Transformation
La table de retournement est née aux Ajoncs
Le concept qui permet de retourner quatre-vingts fromages en même temps a été lancé dans la ferme de la famille Perrin, là où 40 000 unités sont produites chaque année.
Courage, volonté, passion et faculté d’adaptation. Telles sont sûrement les valeurs qui ont conduit Marie et Yvon Perrin pendant leur activité professionnelle. Ils étaient jeunes en janvier 1978 quand ils sont arrivés à la ferme des Ajoncs à Saint- Hilaire-sur-Benaize. Lui venait de Concremiers. L’aide financière de ses parents lui avait permis d’acheter.
Elle venait du Blanc. Les bâtiments étaient en ruine. Le troupeau de chèvres des débuts comptait trente-cinq têtes, pas plus. Comme le troupeau de charolaises, d’ailleurs. C’était un préambule. Le début d’une activité pas toujours facile, devenue plus porteuse une génération après.Couronnée par une innovation : la table de retournement bien utile dans la salle de fabrication des Pouligny-Saint-Pierre.
Bientôt à l’âge de la retraite, Marie ne s’est pas désintéressée de sa profession, au contraire. C’est elle qui nous reçoit en l’absence de sa fille, Anne, aujourd’hui à la tête de la société à responsabilité limitée (SARL) « Les Ajoncs ». Elle raconte. « Notre fils, Hervé, a toujours voulu être agriculteur. Il pilote la Société civile d’exploitation agricole Perrin H. A. Il élève ici, tout près de chez nous une centaine de vaches. Des charolaises au début. Des limousines de plus en plus. Il cultive cinq-cents hectares de terre, bien loin des soixante-dix de notre prise d’activité. Anne, notre fille, voulait être infirmière. Elle a vite déchanté et elle est revenue. C’est là que nous avons déclenché la vente directe. »
L’INNOVATION EN 2013
Deux cent cinquante chèvres aujourd’hui. Des Saanens qui assurent la production de 40 000 fro mages chaque année. « A l’atelier de fabrication, après les opérations de ressuyage, lissage et égouttage, il nous fallait tourner manuellement les blocs moules. C’était très fatigant. Pendant un an, nous avons réfléchi à cette idée de table de retournement. On ne savait pas du tout comment arriver à nos fi ns. Nous avons fait appel à Paul Jeannau, créateur de la société Agriconcept de Bélâbre. C’est lui qui, après avoir consulté des personnes de la profession, dont les représentants de la ferme des Âges, a trouvé le principe. C’était à la fin de l’année 2013. Satisfaits et libérés du poids de lourdes opérations de manutention, nous avons commandé une douzaine de ces tables. Le prix était élevé comme celui de l’inox, la matière première. Nous avons fait des commandes groupées. Le concept a été repris par l’appellation Pouligny mais aussi par l’appellation Valençay. Même des laiteries l’ont adopté. »
Aujourd’hui, Marie et Yvon Perrin sont fiers de la production qui porte le nom de leur ferme. Fiers de leurs enfants. Fiers de savoir leur fille reconnue au sein de l’appellation d’origine contrôlée avec sept autres fermiers et quatre laiteries. Fiers du travail fait en amont. Fiers du travail fait depuis. Avec de la vente à la ferme, des livraisons sur Châteauroux, Issoudun, Le Blanc et Montmorillon et des expéditions sur Rungis, Orly et Nantes.
Pas pour autant qu’il faille oublier deux difficultés hélas bien d’actualité. Le prix de vente, d’abord. « Le fromage que nous proposons ici à 3,90 euros se retrouve dans les rayons des supermarchés à 5 voire 5,50 euros, y’a bien quelque chose qui ne va pas. » La difficulté à recruter aussi. Un vrai problème. Et pourtant il y aurait besoin de deux paires de bras. L’une pour la production fromagère. L’autre pour l’élevage de vaches et la culture de céréales. Alors Marie lance un appel. « Il faudrait quelqu’un qui soit polyvalent, qui en veuille et qui ait le sens de la valeur travail. » Un peu comme les Perrin eux-mêmes sur les deux générations citées. En attendant de voir ce que feront les petits enfants : Lucie, 12 ans, et Maxime, 9 ans, chez Anne ; Clément, 9 ans, et Margot, 8 ans, chez Hervé.